- Livre : Bain de lune
- Auteur : Yanick LAHENS
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- Revue de presse
WWW.ENCRES-VAGABONDES.COM, Dominique Baillon-Lalande, lundi 3 novembre 2014
« Par cette grande fresque, entre histoire d’amour, exotisme, ode et Histoire, Yanick Lahens nous immerge dans les profondeurs de son île où Agwé, divinité de la mer avait déposé ses fils arrachés de Guinée, nous initie à ses traditions et coutumes, nous révèle sa réalité marquée par le surnaturel et le culte vaudou sous le couvert d’un catholicisme feint. Puis, derrière ces composantes ancestrales, et spirituelles du monde rural qu’elle dépeint, elle débusque les signes de modernisation qui pointent et les perturbations profondes qui accompagnent ce processus de changement.
Pour incarner cette confrontation […], l’auteur s’en remet au chœur des paysans humbles et frustres, aux pires victimes de l’exploitation et l’oppression des puissants, aux mieux laissés pour compte.
[…] On ressent dans ce texte émaillé de passages en créole et de références régionales, […] un profond respect pour la culture ancestrale et une colère face au mépris et à la destruction infligée à celle-ci par les hommes. Mais cela est fait sans aucun message passéiste ou nostalgique qui opposerait un paradis perdu à un enfer contemporain.
[…] À l’inverse, [il s’agit d’]un hommage rendu aux populations oubliées de l’île, petites voix étouffées par le vacarme de Port-au-Prince, nature secrète réduite dans les médias à l’image tragique des terres dévastées par les cyclones et tremblements de terre de ces dernières années.
Comme une conjuration du passé, une admiration pour l’énergie du peuple haïtien face aux colères de la nature et à la folie des hommes, un message d’espoir.
Dans ce roman à la langue somptueuse, imagée et sensuelle, on est littéralement submergé par la violence de la mer et du vent, celle du désir amoureux et celle obscure du pouvoir politique.
Le lecteur, pris dans les mailles du filet de cette famille […], ressort comme ensorcelé par ce chant chargé d’ombre et de mystère, au croisement du réalisme et du surnaturel.
Yanick Lahens offre ici un tableau personnel et contrasté de son pays, avec un récit complexe et halluciné, lyrique et intime, habité par un souffle puissant. La magie opère et on se laisse envoûter. »