L’ORIENT-LE JOUR, Georgia Makhlouf, jeudi 2 juillet 2020


Dima Abdallah et l’exil intérieur

Propos recueillis par Georgia Makhlouf

« Dima Abdallah fait son entrée en littérature avec un très beau premier roman, Mauvaises Herbes qui sort en août chez Sabine Wespieser. Cette jeune libanaise qui a vécu ses douze premières années dans un Liban en guerre avant de s’installer à Paris, est devenue archéologue, mère de famille et depuis peu, romancière. Dès les premières pages, on est saisi par la singularité du regard et déjà, le style. Épousant avec subtilité le point de vue d’une enfant prise dans les mailles serrées de la violence, elle raconte son lien si fort à son père, ce géant aux pieds d’argile dont elle perçoit la vulnérabilité. Au fil des années, la petite grandit, mûrit, comprend mieux le monde, mais partage avec son père à qui elle voue un immense amour, un certain mutisme, une certaine inadaptation au monde, une incapacité à rentrer dans les catégories familières où l’on classe habituellement les gens. Son père, dont la voix alterne avec la sienne, prend son stylo tous les matins et « va dans l’arène pour faire la peau à l’absurde », pour réinventer en permanence un pays, sur les feuilles blanches qu’il noircit avec rage. Mais c’est aussi lui qui enseigne à la petite le langage des plantes, la botanique est leur terrain commun. Et ils aiment tous deux les adventices, ces mauvaises herbes qu’ils se gardent bien d’arracher. Rencontre avec l’auteure pour évoquer ce beau récit d’un sauvetage, d’une liberté préservée de haute lutte contre les violences du monde et ses injonctions contradictoires. »

https://www.lorientlejour.com/article/1224306/dima-abdallah-et-lexil-interieur.html