LE FIGARO MAGAZINE, Jean-Marc Parisis, vendredi 8 mars 2013


« Tombée du ciel »

« Sur un quai de métro, une femme, et un vieux monsieur inconnu, qui lui sourit avant de se jeter sous la rame. Elle devait rejoindre un homme dans un hôtel sur une côte sauvage. Elle n’ira pas, rentre chez elle, ressort. Déportée par le sourire du suicidé, elle dérive dans Paris, sur ses chemins intérieurs. L’homme qui l’attend est photographe, elle se repasse leur longue histoire, des hauts et des bas, des voyages et du surplace, du soleil et des éclipses. Le ciel craque de souvenirs plus lointains. Un grand-père qui marchait avec elle dans les prés perlés de rosée, les adieux ratés à un père mort trop tôt et qui lui aura toujours manqué, la balançoire d’un jardin public où sa mère l’asseyait. Les moments les plus forts concernent le legs de l’enfance, une enfance dont on n’a plus idée, tant elle se tissait d’ennui, et donc d’imaginaire et de gravité. La femme ne s’accorde pas à l’étroitesse du présent. Avec qui partager l’ébloui et le suffocant ? Avec l’homme, peut-être. Il faudrait inventer d’autres instants qui soient dignes que l’on s’en souvienne. Les révolutions intimes suffiraient sans doute à changer la vie. Ici, la pluie tombe comme la vie coule. En tournures, en épiphanies simples et lustrales. Écoutez Michèle Lesbre écrire. »