- Livre : Une vie entière
- Auteur : Robert SEETHALER
- Article complet
- Revue de presse
L’EST RÉPUBLICAIN, Lysiane Ganousse, coup de cœur de Marc Didier, librairie Didier (Nancy), lundi 22 août 2016
« L’été, on est livre ! »
« […] Ce handicap lui vaudra bien des moqueries dans l’enfance, et de se sentir régulièrement exclu des petites bandes… autant que de la marche du monde. Marc Didier, le libraire de la rue Stanislas, est plein d’empathie pour ce personnage dont il découvre l’existence dans Une vie entière, roman de Robert Seethaler. Également auteur du Tabac Tresniek dont, dans cette même rubrique l’été dernier, nous étaient aussi vantés les mérites. Seethaler a le chic pour se faire lever une arcade sourcilière, avec une économie de moyens stylistiques qui précisément en font tout l’intérêt. En Allemagne, les libraires lui ont décerné le prix de « Meilleur auteur de l’année ».
Mais revenons à Andreas Egger, le jeune estropié citadin envoyé dans ces montagnes autrichiennes où il va donc passer… une vie entière (à quelques années près, comme on le verra plus tard). Les années 30 marquent le début du développement des sports d’hiver, il en sera une cheville ouvrière, comme employé dans une entreprise fabriquant des remontées mécaniques, où il se fait incontournable. Entre-temps, en 1933, il a eu l’occasion de sauver un berger pris dans une tempête de neige, qu’il met à l’abri dans une auberge où il rencontre Marie la serveuse. Au moins aussi timide que lui. On est peu causant chez les montagnards. Mais ils finissent par se rapprocher. Sa déclaration d’amour fait d’ailleurs l’objet d’une des plus belles scènes du livre. On vous laisse la découvrir…
Ne nous emballons pas toutefois pour l’heureuse fin romantique qu’on lui prévoit déjà. Oui, la jeune serveuse répondra… oui. Mais la félicité n’est pas faite pour notre personnage condamné au destin mineur…
Sur les années 30 passe l’Anschluss, puis tombe le couperet de la Seconde Guerre mondiale, Andreas est envoyé sur le front de l’Est. Sa maudite boiterie ne suffit pas à l’exempter. Il tient les nazis pour de parfaits cinglés mais se résigne tout de même. Il est homme à faire le dos rond face à la rigueur des événements de toute façon, un survivant coûte que coûte, sans trop se poser de questions, et malgré tous les obstacles que la vie a pu lui opposer. Modeste personnage, à l’humanité simple et criante, une humanité résistante en cela qu’elle plie sous les coups mais ne rompt pas. Presque une sorte de fable philosophique, en conclut Marc Didier. Avec une qualité d’écriture sans esbroufe aucune, qui nous conduit à suivre le personnage absolument jusqu’au bout. Pour une vie entière… »