GRAZIA, Romain Charbon, vendredi 23 septembre 2016


« Se méfier des guérisseurs »

« L’Irlandaise Edna O’Brien signe une fresque sur le bien et le mal. Petites Chaises rouges, certes, mais grand livre.

Les Petites Chaises rouges signent le retour d’Edna O’Brien à 85 ans, après de magnifiques mémoires. L’auteur du scandaleux Les Filles de la campagne, qui marqua les années 60, et plus récemment de Crépuscule irlandais, signe cette fois un ambitieux mélange de romance et de politique, un texte librement inspiré de Radovan Karadzic, le génocidaire serbe qui publiait des vers. Un moyen pour elle de décrire la déflagration de la grande histoire sur une communauté innocente. Dans un village d’Irlande, un étranger à l’allure de druide s’installe comme guérisseur. D’abord méfiants, les habitants sont bientôt charmés par sa connaissance des plantes et des poètes anciens. Une femme mariée tombe amoureuse de lui. Quelques mois plus tard, il est arrêté et jugé à La Haye pour génocide, en tant que responsable du siège de Sarajevo. Sublime dans sa première partie, qui s’écrit au cœur du village […], Edna O’Brien se montre une fois encore magicienne du style, maniant une langue en même temps âpre et lyrique. Elle est surtout et plus que jamais une extraordinaire observatrice de l’humain. »