LA VIE, Anne Berthod, jeudi 28 septembre 2023


Après son Haïti natal, les camps de migrants libyens et les ghettos américains (Milwaukee Blues, finaliste du Goncourt), la plume voyageuse de Louis-Philippe Dalembert nous révèle aujourd’hui les dessous de Rome, où il a vécu, par le prisme de l’aristo-bourgeoisie. Il oppose ainsi deux lignées matriarcales : celle, catholique, de la mondaine et très guindée comtesse de Pretis, que la noblesse désargentée contraint à d’inventifs compromis pour tenir son rang et faire vivre son clan ; et celle, juive et laïque, de la tante Rachele, mamie gâteau large d’esprit, qui déborde d’amour depuis le sauvetage de sa fratrie par des résistants.

Difficile d’échapper aux traditions familiales, autant chez Elena, qui s’est rebellée contre sa comtesse de mère pour épouser le petit-neveu de Rachele, que chez leur fille Laura, qui se cherche (et se perd) dans le Rome renaissant des années 1970. Dalembert, lui, ne perd jamais le fil. Entre la rive droite huppée et la rive gauche moins cossue du Tibre, il revisite un demi-siècle d’histoire dans un dédale de rues, de digressions et de phrases à rallonge bourrées d’ironie, faisant de ces femmes fortes et hautes en couleur autant de portraits irrésistibles.