L’ALSACE, Jacques Lindecker, vendredi 30 août 2024


Elle courait, Emma. Tout le temps, à bout de souffle, douée mais sans la ramener. Hélas, les crocs d’un molosse ont broyé sa jambe, elle est devenue la boiteuse. La descendante de harkis a connu à son tour l’humiliation, le gâchis. Maryline Desbiolles, flamboyante, en colère, raconte ce destin fracassé, victime collatérale d’une l’Histoire mal soldée.

C’est qu’elle courait, Emma. Emma Fulconis, la fille du garagiste. « Toujours on l’a connue qui courait, […] elle ne pouvait circuler qu’à toute allure, qu’elle ne pouvait faire autrement que débouler » dans les sentiers et la broussaille autour de L’Escarène, dans l’arrière-pays niçois. Elle courait à n’importe quelle occasion. Elle courait de plus en plus : « Elle se mit à s’entraîner. Je vais m’entraîner, elle disait. » […]
C’est une colère, une rage, le besoin de rendre justice, qui rend (l’écriture de) Maryline Desbiolles somptueuse, flam- boyante, parfois tendre, par- fois au scalpel car, oui, d’une précision chirurgicale. Elle raconte le drame individuel de l’adolescente, métaphore terrible de la tragédie collecti- ve. Comme Emma est restée éclopée, l’Histoire, celle des harkis, des camps, des humi- liations, de la mise au ban, est restée claudicante, inaboutie, gâchée pour tout dire.

Un récit porté par un de ces souffles, une âpreté, ah le bel hommage aux ailes de vent d’Emma, elle l’aimait, le vent. « Souvent elle se cabrait, mais au vent elle consentait. »

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