LE TEMPS (Suisse), Lisbeth Koutchoumoff Arman, samedi 7 septembre 2024


Il y a cette image, forte et pourtant si délicate, si ténue, au tout début du livre, celle d’une jeune fille qui marche dans l’arrière-pays niçois : « On ne voit qu’elle. Même très petite, de loin, à l’assaut dérisoire de la pente. Minuscule battement dans l’après-midi, épinglé de lumière, qui pourrait ne jamais finir. »
Telles sont les premières phrases de L’Agrafe de Maryline Desbiolles et tout de suite on est pris par le mouvement même de la langue, pris dans la foulée des mots et par cette image d’un élan inarrêtable d’autant plus touchant qu’il est fluet, instable, claudicant. Oui, car le personnage d’Emma Fulconis boite, celle que l’on surnommait l’athlète, jeune gloire locale, l’espoir de L’Escarène, son village, a failli perdre une jambe des suites d’un accident. L’agrafe est le surnom du péroné, cet os gracile accroché au tibia, pulvérisé ici. La petite jambe est devenue raide.

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