LIRE MAGAZINE, Camille Thomine, octobre 2023


Le comptoir du monde

Lorsqu’il reprend le vieux café du marché des Carmélites, enclave populaire dans la Vienne effervescente de 1966, Robert Simon ne sait comment le baptiser. Quel nom donner à un lieu qui les résume tous, à la fois rêve d’un seul et maison de chacun, refuge du passé et fenêtre sur l’avenir ? Avec ou sans nom, les murs résonnent bientôt des rêves de fortune et brèves de comptoir d’une poignée d’habitués, dont les parties de cartes, scènes de ménage et confidences au-dessus des schnaps et tartines de saindoux font fi des saisons. Plus que jamais, le « punch » à la Seethaler – mélange d’empathie, de nostalgie et de sens du détail  – fait merveille à rendre cette chambre d’écho de la transformation d’un monde, dont le galop présage l’abandon de quelques âmes sur le bord du chemin.