MARIANNE, Clara Kane, samedi 25 janvier 2014


« Cimes et châtiments »

« Duong Thu Huong a connu des drames. Parmi eux la disparition inexpliquée de son neveu adoré. Elle semble le chercher à travers tous ses héros, se heurtant au brise-lames de l’existence. Thanh ne fait pas exception. En contant les déboires de ce garçon, l’écrivain renoue avec la veine lyrique de son roman inouï Terre des oublisMes livres doivent toucher l’humanité profonde, explique-t-elle en français. On me dit fataliste ; or, l’amour parental ne suffit pas à sauver un enfant. Son protagoniste est promis à un bel avenir, mais il est dépassé par le nirvana de ses désirs : Une catastrophe secrète… Pour la première fois de sa vie, il découvre la vérité sur lui-même. Sans doute était-elle déjà là, enfouie comme un minerai sous la montagne.

En s’attaquant à l’homosexualité, l’histoire embrasse une complexité taboue. Huong se dit choquée par les opposants au mariage pour tous : Pourquoi interdire le bonheur à autrui ? Une quête inenvisageable et désespérée pour Thanh, face à la gêne de la société vietnamienne. C’est pour préserver sa famille qu’il fuit. Il suit Phu Vuong, qui l’entraîne vers les abysses d’un amour véreux. La liberté pure n’existe jamais, estime l’auteur. Ce roman, de toute beauté, veut démuseler les esprits, alors même que le héros se trouve derrière les barreaux. Il songe aux collines verdoyantes de son enfance, parsemées d’eucalyptus, cette plante dite nourricière qui a ravagé la terre. Une métaphore du communisme détruisant le Vietnam de l’intérieur. Si les bourreaux avancent masqués, Duong Thu Huong se décrit comme un livre inachevé, ayant encore beaucoup de batailles et de rêves à réaliser. »